« Ça vous fait mal ? » Demanda l'infirmier, arrachant un grognement à Dan. Elle s'écria : « Non pas du tout ! Je suis venue ici pour le plaisir de visiter ! Vous êtes vraiment infirmier ou vous avez couché avec le doyen pour avoir ce poste ? Crétin. » Le jeune infirmier s'offusqua face aux paroles de la terrible brune et prit un malin plaisir à lui faire mal alors qu'il lui bandait sa cheville foulée. Et Dan ne se gêna pas pour lui hurler dessus et le taper en lui ordonnant d'arrêter. Maudit taré !


« Les soufflés aux fromages, c'est difficile à faire. » Dan releva lentement la tête de son bouquin, espérant qu'au moment où elle poserait les prunelles sur la personne qui venait de dire ça, celle-ci se carapaterait à toute allure. Perdu. Au lieu de ça, elle eut droit au grand sourire de l'infirmier psychopathe. Elle le fusilla du regard et refusa de lui répondre, se replongeant dans sa lecture. Peine perdue puisque le jeune homme s'installa sur la chaise en face de la sienne. « Je le sais, j'en ai fais un hier. » Ayant une patience plutôt inexistante, Daniella abaissa son bouquin et vint heurter bruyamment la table, posant un regard sévère dans le sien. « En tout cas toi, t'es bien un soufflé au fromage : tu gonfles ! » Elle se leva et quitta la pièce sans se retourner, désireuse de s'éloigner de cet étrange individu. Et pourquoi il lui parlait d'abord ?


« Tes cheveux ils brillent au soleil. » Le psychopathe, le retour ! Sans se retourner, Dan continua de traverser le parc d'un pas pressé. « Ouais bah éloigne toi, tu leur fais de l'ombre. » En vain. Il remonta jusqu'à sa hauteur et se mit à causer. Encore et encore. Il lui parla du garçon qu'il avait soigné ce matin. Puis de ce qu'il avait mangé à midi. Et enfin de la fois ou il avait eu une petite fuite en pleine nuit à l'âge de 8 ans... Fascinant. Énervé contre lui-même d'avoir gaffé de la sorte devant elle, il s'écria subitement : « De toute façon je te déteste ! Et tes cheveux ne brillent même pas, ils sont tout noirs ! Ils sont sombres comme... comme ton âme ! Et si tu répètes ce que je viens de dire à quelqu'un je te.. je.. tu verras bien ! Et ne viens plus me parler. » Oh mais elle ne demandait pas mieux la petite Daniella. Cependant, elle s'arrêta pour le regarder s'éloigner, interloquée par sa réaction. Ce mec ne tournait pas rond.


« Je te ramène ? » Dan secoua la tête de gauche à droite, affrontant la pluie torrentielle de ce mois d'Octobre. Sa voiture avait refusée de démarrer car la batterie était à sec (maudits phares oubliés !). Et elle devait rentrer du centre-ville jusqu'au campus. Autant vous dire qu'elle allait se transformer en cascade d'ici-là. « Mais tu vas tomber malade ! » Lui disait-il à travers la fenêtre entrouverte. Elle haussa les épaules, ne pipant toujours pas mot. Il continua d'avancer au même rythme qu'elle, cessant d'insister. Mais il se mit à parler, encore et toujours. Du café renversé sur sa chemise ce matin, de sa chute dans les escaliers de l'université, des dernières infos du journal de Laramie, des ratons-laveurs aussi, puis qu'il aimerait bien aller en bord de mer et... « LA FERME ! Pourquoi tu me suis bon sang ? » Et dans un naturel déconcertant il répondit : « Bah, pour être sûr qu'il ne t'arrive rien. » C'était aussi mignon que désespérant. Elle roula des yeux et proposa : « Je monte seulement si tu n'ouvres plus cette maudite bouche, compris ? » Il mima le fait de fermer à clé sa bouche et hocha la tête. Elle grimpa donc et.. il se mit à parler. Elle se bouchait les oreilles et répétait "lalala" sans cesse pour couvrir le son de sa voix : insupportable ! Arrivé au carrefour avant le campus, elle descendit de la voiture alors qu'il s'était arrêté et fila en courant. Maudit, maudit, maudit infirmier !


« J'ai très envie de t'embrasser. » Daniella s'étouffa en avalant sa gorgée de café et recracha le tout sur le beau brun. Elle le détailla de haut en bas et fit une moue dégoutée. Elle lui balança d'ailleurs le reste de son café chaud au visage (chaud, pas brûlant heureusement !) et quitta la cafétéria, ne réalisant toujours pas ce qu'il venait de dire. Mais elle fut alors projetée contre un mur, bloquée et ses lèvres furent prises d'assaut. Elle écarquilla les yeux et mit quelques secondes à réagir. Là, elle repoussa le jeune homme et lui retourna une gifle monumentale. « Pauvre demeuré, je te conseil de plus m'approcher toi et ta grande gueule. » Avec son pouce, elle mima contre sa propre gorge le fait de lui trancher la tête. Et alors qu'il s'énervait et l'insultait de façon étrange, elle s'éloignait, troublée. Ce mec était trop compliqué, trop étrange. Ça la saoulait. Ça la fascinait aussi. Mais ça la saoulait surtout !



« Surprise ! C'est pour toi. » Dan, appuyée contre la porte de sa chambre posa son regard sur la boite de chocolat qu'il lui tendait. Il lui offrait des chocolats, franchement ? Elle releva les yeux vers lui, stoïque, impassible. Et il n'en fallut pas plus pour qu'il s'emporte. « Merde tu les veux ou pas ? C'est oui, c'est non, ou c'est merde ! » Très calme, la brune répondit : « Merde. » Il devint tout rouge et ses mains se mirent à trembler. Les paroles fusaient de sa bouche et il se mit à avaler tous les chocolats, l'insultant encore et encore. Agacée, elle roula des yeux. Elle s'empara de la boite et la jeta dans le couloir et tout en s'emparant de son t-shirt elle soupira : « Ramène-toi, crétin ! » Elle referma la porte derrière eux et lui céda pour la première fois, partageant ses draps avec lui. Mais le lendemain matin, le réveil fut brusque. A peine avait-elle ouvert les yeux qu'elle lui tapait déjà dessus. « Pourquoi t'es encore là toi ? Allé dégage, tu pollues mon air ! » Perdu et surprit, il n'opposa pas de résistance et fila, se rhabilla en vitesse et fila sous la voix autoritaire et agressive de Daniella. Une fois la porte refermée, il soupira. Partagé entre la déception et la satisfaction.

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