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 Joey || Les femmes vexées et bafouées sont dangereuses

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P. Cleo Everson

P. Cleo Everson


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DC : Billie
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CITATION :
We are lonesome animals. We spend all our life trying to be less lonesome.

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filière/métier: L1 Politique à la rentrée
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MessageSujet: Joey || Les femmes vexées et bafouées sont dangereuses   Joey ||  Les femmes vexées et bafouées sont dangereuses Icon_minitimeDim 17 Juin - 17:41


Joey & Cleo
« Les femmes vexées et bafouées sont dangereuses »


Codage fait par .Jenaa



    Ce matin, j’ai faim. Oui, parfois, ça m’arrive. Je me réveille, dans ma chambre aux murs clairs, je tourne la tête, tandis qu’un rayon de soleil frappe mon visage, et je me rends compte que j’ai envie d’un petit déjeuner. C’est rare, je vous l’accorde. Mais pas impossible. Et ce matin, donc, les rayons du soleil me tirant de mon demi-sommeil me font ouvrir les yeux, sous les grondements de mon estomac vide. Je souris, euphorique, sans trop savoir pourquoi. Je saute de mon lit, traverse ma chambre, empressée, guillerette. Je suis prête en un temps record, vêtue d’un slim 7/8 aux teintes claires, et d’une blouse légère, blanche. Mes cheveux roux ondulés retombent sur mes épaules, j’attrape mon sac, saute dans des espadrilles compensées que je lace d’un geste rapide, chausse mes lunettes de soleil, et m’enfuit en claquant la porte. Mon téléphone m’indique qu’il est déjà dix heures. Eh bien… J’aurais dormi au moins sept heures cette nuit, c’est une véritable surprise ! Je n’aime pas dormir. Pas trop, j’ai l’impression d’être fatiguée après.
    La cafétéria n’est pas trop bondée, et tant mieux. Vu le prix que l’on paye à l’année (dérisoire si vous voulez mon avis), ils ont tout intérêt à servir une nourriture potable. Je pénètre dans l’endroit, passe devant quatre élèves, qui protestent, sans attirer ne serai-ce qu’un instant mon intérêt, et attrape un plateau, sur lequel je dépose une pomme, verte, et un muffin aux myrtilles. Je double encore deux personnes pour accéder directement à la caisse. La pauvre cruche, qui a visiblement bien raté sa vie (tenir une caisse, c’est déjà l’avoir raté… Vivre dans le Wyoming aussi… Mais alors tenir une caisse dans le Wyoming… Ouch ! Chérie, le suicide a été inventé par, et pour des gens comme toi, tu sais ?), me regarde, sans comprendre, et je pousse un soupir à fendre l’âme.

    « Un Earl Gray, presto. »

    Elle me regarde, interrogatrice, semblant ne pas comprendre. Je hausse les sourcils et claque des doigts, ce qui la met en marche. Eh bah quand même, j’ai failli attendre ! Tandis que la machine derrière elle rugit, le gobelet en carton (brr…) recevant l’eau bouillante pour le thé, si cher aux anglais et aux chinois, elle pianote sur sa caisse-enregistreuse, pour me facturer mon repas.

    « Vous êtes toujours aussi lente et GAUCHE ? » crachai-je, impatiente, incapable d’attendre.

    Il était loin, le temps où on m’apportait mon petit déjeuner au lit. Même dans cet hôpital où je suis restée huit mois, ils avaient compris le principe. Cette université laissé décidément à désirer… Je n’demande pas la lune quoi… Juste qu’on me prépare mon thé rapidement ! Je tends la somme exacte, au moment où la machine émet un « bip », signe que l’eau est prête. Et c’est la panique chez la jeune femme. Argent, ou thé ? Thé, ou argent ? Que faire d’abord ? Elle recule, mais je la fusille du regard. Non mais elle croit VRAIMENT que je vais rester à tendre sa monnaie pendant plus d’une seconde ? Elle s’avance, je lâche l’argent, qu’elle doit s’affairer à ramasser (sur le comptoir seulement malheureusement). Je la toise quand elle m’apporte le gobelet contenant l’eau bouillante.

    « Et le thé sinon ? »

    Elle s’excuse, attrape le sachet d’Earl Gray, le dépose sur mon plateau, m’adresse un pauvre sourire et un « Bonne journée… » à mi-voix. Je la fusille du regard sans un mot, tourne les talons, et traverse la cafétéria, pour aller m’installer à une table de libre. Table de quatre, pour emmerder ceux qui en chercheraient une. Non, je ne bougerais pas, et tu n’emprunteras pas non plus les chaises. Mange par terre. Je me laisse tomber sur la chaise, croise les jambes, enlève le cache en plastique du gobelet, déchire l’emballage du sachet de thé, et le laisse tomber dans l’eau chaude, très chaude, observant le liquide changer de couleur, le thé se répandre, parfumant légèrement l’air aux alentours, dessinant des arabesques dorées, ambrées, avant que le liquide ne devienne homogène. J’attends un peu, pas trop longtemps, et finit par retirer le sachet, le laissant sur le cache en plastique. Du bout des doigts, j’arrache un bout de mon muffin, et le porte à mes lèvres. Mon ventre m’en remercierai presque s’il pouvait parler. Ce qui n’est pas le cas. Les ventres ne parlent pas, tout le monde le sait. Un morceau, un autre… J’en deviendrais presque gloutonne ! J’essuie mes doigts sur une serviette en papier, réfléchissant, laissant mes pensées me porter, me transporter, ailleurs dans une dimension bien plus reluisante et plaisante que ce trou à rat. J’ai envie de faire du shopping. En fait, non. J’ai juste envie de dépenser de l’argent. Je n’ai envie de rien, besoin de rien, je veux juste flamber, faire chauffer ma carte bleue. Je n’ai pas envie d’être seule. Mais il n’y a personne avec qui j’aimerais pratiquer cette activité. Je désespère. Mes lèvres laissent échapper un soupir à vous fendre l’âme (pas la mienne, je n’en ai pas, je n’en ai plus), et je porte la boisson à mes lèvres. C’est chaud, bien trop chaud, mais je bois quand même, parce que j’aime ça, j’aime cette sensation, le liquide qui vous brûle la gorge, les lèvres, descend dans votre œsophage, et réchauffe tout votre corps. Un thé en plein hiver, quand vous revenez du ski, je ne connais rien de meilleur au monde. Même le chocolat chaud ne peut pas rivaliser. De toute façon, le lait m’écœure.
    Je regarde autour de moi, mes lunettes de soleil posées sur la table. Je cherche de quoi stimuler mon esprit. Quelque chose, n’importe quoi. Des cris attirent mon intention, je tourne la tête. Une blonde aux racines brunes (fausse, fausse ! Laide !) s’époumone devant une pauvre brune, qui semble n’avoir rien demandé à personne. Par terre, une boisson, renversée. Les chaussures (laides aussi) de la fausse blonde, tâchées. Boisson de qui, faute à qui, je n’en sais rien, je n’ai pas suivi, et je m’en fiche en fait. Enfin, je m’en ficherai réellement si la brune m’était inconnue. Mes sourcils se froncent, et je sens la rage et la colère enserrer ma gorge. Non. Hors de question. Jamais. Je me lève, attrape mon thé, et parcourt à nouveau le chemin, direction la blonde, et la brune.
    Un choc, un cri, encore un (à croire qu’elle ne sait faire que ça), voilà une bonne moitié de mon thé renversée sur le t-shirt de la jeune femme. Je la toise, elle est au bord de la crise de nerf. Attention à ne pas exploser. Elle gonfle, elle gonfle.

    « C’est pas comme si ton t-shirt n’était pas laid à la base… »

    Je souris, hypocrite, vile. Elle pousse un énième cri, de rage, et tourne les talons, suivie par deux autres jeunes personnes, qui tentent de la raisonner, de la calmer. Je les regarde s’éloigner en souriant puis, prenant conscience de la présence à mes côtés, je tourne la tête, perdant automatiquement mon sourire. Je fixe Joey, silencieuse, une minute.

    « Une vraie gourde. »

    Je l’ai dit du ton le plus méchant que j’ai en réserve, poussant le ton de ma voix à l’extrême. Je ne sais pas pourquoi. J’ai envie de lui faire du mal. Et en même temps… Je fais volte-face, retourne à ma place, et recommence à mettre en pièce mon muffin, sans le manger cependant cette fois. Mon estomac est noué, je n’ai plus faim. Plus vraiment.

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